Appartement témoin situé dans Lower Manhattan
50 West Street NYC
Date de réalisation
2016
Chargé(e) de projet
Marc Bherer
Photos
Neil Landino
Clients: Société immobilière Time Equities inc.
La tour en verre bombé de l'architecte Helmut Jahn, le 50 West Street, qui compte 64 étages et 191 logements promet un cadre de vie d'une somptuosité jusque-là inconnue dans le Financial District. Composant avec la vocation du quartier, elle abrite des bureaux sur les niveaux inférieurs. Les appartements panoramiques, ne démarrent qu'au 14e étage.
Été 2016, la progression des ventes fléchit, après un début fulgurant (30% trouve preneur en une journée). Afin de susciter un regain d'intérêt pour les unités encore disponibles, Time Equities confie à Desjardins Bherer l'aménagement de l'un des duplex. On peut s'étonner qu'une société immobilière new-yorkaise recrute un studio de design montréalais. En fait, le directeur général Francis Greenburger a pu apprécier les compétences de Desjardins Bherer lors des travaux effectués, une dizaine d'années auparavant, dans les deux appartements qu'il possède à Montréal, « Un projet livré au coût et à la date prévus. C'est ce qui a impressionné le client, notre respect strict des limites budgétaires et de l'échéance. »
Depuis les débuts, le positionnement publicitaire du 50 West Street s'illustre à travers le slogan Redéfinir les codes du luxe. En ce sens, Desjardins Bherer était la firme de la situation. Aux antipodes du parti-pris américain, l'opulence telle qu'ils la pratiquent joue le jeu d'une représentation dépouillée où le raffinement plutôt que l'ostentatoire, la qualité des matières contrastées, le juste meuble au bon endroit, un chic qui n'oublie jamais le confort revisitent les signes extérieurs de la richesse.
Le décor d'un appartement modèle a ceci de contraignant, qu'il doit plaire au plus grand nombre. « Susciter l'envie de vivre au 50 West Street », tel est le mandat. La réponse des designers? User de discrétion pour ne pas détourner l'acheteur potentiel de la vue sur l'Hudson River, « le grand atout du projet », et ramener à taille humaine les volumes démesurés de la pièce style loft au premier niveau. « Par ailleurs, nous voulions qu'on ''sente'' la double hauteur sous plafond, l'effet de luxe qui s'en dégage. »
Donc, dans un premier temps, recouvrir de miroir l'alcôve située sur le mur perpendiculaire à celui de l'immense baie vitrée. Un moyen de reflèter les gratte-ciels avoisinants, d'élargir visuellement la pièce tout en longueur et d'équilibrer les lignes de force. Garnie de profonds canapés bas sur pattes, l'alcôve miroir symbolise la convivialité. Comme un aimant, elle attire le regard. Du coup l’espace semble plus chaleureux qu'il ne l'est en réalité.
1
9À partir de là, convoquer pour l'ameublement l'Amérique des années 50 et ses designers culte (Georges Nelson, Eero Saarinen, Hans Wegner, etc.). Animer les murs à l'aide d'œuvres d'art actuel, impeccables sans être trop spécifiques. Outre la note sophistiquée qu'elles ajoutent, certaines ont aussi une fonction structurale. C'est le cas du grand tableau nocturne au-dessus de l'alcôve: bien qu'il serve de référence horizontale, il sublime la verticalité de la pièce puisque l'œil ne s'y arrête pas. Le lustre sculptural dans la salle à manger remplit le même rôle, si ce n'est que la disposition en grappe des six luminaires donne au plafond une impression de proximité. Conséquemment, le ressenti de vide généré par les pièces très hautes s'atténue.
En bout de ligne, placer ici et là quelques points d'exclamation - tapis circulaire Eden de Marcel Wanders, lampes de sol Toio des frères Castiglioni, suspensions Bloom de Ferruccio Laviani au scintillement exceptionnel. Ces éléments forts, inattendus, insufflent du pep à l'ensemble. Dans un aménagement somme toute conventionnel, ils apportent la vie qui trop souvent manque aux maisons témoins. L'air de rien, c'est le genre de détail flashy susceptible d'accrocher une autre clientèle ciblée par Time Equities: les trentenaires cool et fortunés dits yuccies. Mission accomplie pour René Desjardins et Marc Bherer. Conservateurs, progressistes ou snobs, expatriés ou New-Yorkais de vieille souche, amateurs de design ou pas, chacun peut se reconnaître dans le duplex aménagé au 50 West Street.
Collaborateurs : Helmut Jahn architecte, QuallsBenson (rendus extérieurs)